Author/Uploaded by Loic Le Pallec
Les éditions – Le Lac aux Fées 23 rue du Lac aux Fées 18250 Henrichemont www.leseditions-lelacauxfees.fr/ www.facebook.com/Editions.LeLacauxFees Le Code de la propriété intellectuelle n’autorisant, aux termes de l’article L. 122-5, (2° et 3°a), d’une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d’autre...
Les éditions – Le Lac aux Fées 23 rue du Lac aux Fées 18250 Henrichemont www.leseditions-lelacauxfees.fr/ www.facebook.com/Editions.LeLacauxFees Le Code de la propriété intellectuelle n’autorisant, aux termes de l’article L. 122-5, (2° et 3°a), d’une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d’autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d’exemple et d’illustration, « toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (article L. 122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle. Loi n°49.956 du 6 Juillet 1949 sur les publications destinées à la jeunesse ISBN : 978-2-493496-01-0 Prologue Le rêve apparut au cours de sa dix-huitième année. Un rêve flou, traversé par une voix lointaine. Un appel. Les premières fois, cela ne lui laissa qu’une impression vague au sortir du sommeil. Mais, au fil du temps, le songe devint une véritable obsession. Les images étaient toujours les mêmes. Une succession de couloirs, de portes, une chambre, un corps étendu. La voix qui venait troubler son sommeil lui était familière. Cette voix répétait inlassablement : – Il faut que tu viennes me sortir de là… Tu es loin, je sais… Quelque part au dehors. Je le sens… Je t’attends. Il faut que tu viennes me sortir de là, petite sœur… Elle se réveillait en sursaut, le corps couvert de sueur, haletante. Elle s’habillait en hâte pour aller se chalumer un fumigène sous la voûte étoilée. La vision du ciel constellé et le silence relatif des bois l’apaisaient. Elle retrouvait graduellement son calme. Ces nuits-là, pourtant, il lui était impossible de se rendormir à l’idée de se retrouver une nouvelle fois prise au piège de ses songes. C’est parce qu’elle voulait mettre un terme au cauchemar qui la hantait qu’Arbèle Kaine décida de quitter les forêts profondes des territoires interdits. PREMIÈRE PARTIE 1 Arbèle était restée immobile longtemps, ses jambes commençaient à s’engourdir. Malgré l’inconfort de sa position, elle continuait à observer avec attention les trois blindés qui progressaient en contrebas. Elle connaissait parfaitement le secteur, aussi savait-elle que les véhicules de l’ARBOL n’avaient pas d’autre option que d’emprunter un étroit goulet pour quitter la vallée. À cet endroit, le relief accidenté et l’étranglement progressif du canyon obligeaient le convoi à rouler au pas sur plusieurs centaines de mètres. Elle avait déjà repéré l’endroit idéal : une brèche dans l’escarpement, juste avant que le chemin ne s’élargisse à nouveau. C’était là qu’il lui faudrait se dissimuler pour attendre leur passage. Lorsque le dernier véhicule du convoi se trouverait à sa hauteur, elle n’aurait qu’à se glisser dessous pour se trouver une place aussi confortable que le châssis du véhicule le lui permettrait. En prévision du périple, elle avait confectionné un hamac de fortune. Un solide filet qu’elle aurait tout juste le temps d’arrimer entre les longerons du blindé. Le voyage ne serait pas de tout repos, mais elle s’était longuement préparée. Un cri bref déchira le silence. Un cri que n’importe quel ornithologue amateur se serait empressé d’associer à celui que pousse l’arbusier des crêtes lorsqu’on s’approche trop près de son aire. Arbèle était trop habituée aux chants des oiseaux de la forêt pour se laisser berner. Elle détourna un instant les yeux de ses binoculaires. Allongé comme elle sur un surplomb rocheux situé à quelques centaines de mètres, le jeune homme qui venait d’imiter le cri du rapace pointa deux fois son index vers le ciel. Elle le remercia d’un geste avant de ramper prestement vers une anfractuosité de la roche à l’intérieur de laquelle elle se dissimula. Le Manta apparut quelques minutes plus tard, effectuant plusieurs survols de la zone. À son dernier passage, l’engin réduisit considérablement sa vitesse pour approcher au plus près des falaises. L’ombre de la carlingue s’étala sur les contreforts de la paroi rocheuse et Arbèle retint son souffle. Le faible ronflement des rotors résonnait au-dessus de sa tête comme le bourdonnement d’un insecte menaçant. Le chasseur se maintint en vol stationnaire pendant un moment, puis le pilote poussa finalement les gaz et le Manta s’éleva rapidement dans les airs. Arbèle attendit que son spectre disparaisse à l’horizon avant de quitter sa cache. Elle s’éloigna du promontoire pour entamer la descente qui conduisait jusqu’au bivouac. Krank était déjà sur place, occupé à démonter l’abrimobile qui les avait protégés la veille. – J’ai bien cru qu’ils nous avaient repérés ! lança-t-il avant de glisser la tente compacte dans son sac à dos. Arbèle ne répondit pas. Elle effaça les traces du foyer en dispersant les cendres et les restes de bois calciné du bout de sa botte. Quand elle eut terminé, elle leva la tête pour inspecter le ciel, comme si elle craignait encore quelque menace aérienne, puis elle se mit en route, pressée de rejoindre le camp. « Drôle de fille », pensa Krank avant de lui emboîter le pas. Assise en face de Quémal, sous la toile de l’abrimobile, Arbèle buvait à petites gorgées la tasse d’ôtcha brûlant que le chef des résistants venait de lui offrir. En la regardant, l’homme ne put s’empêcher de constater l’ampleur du changement qui s’était opéré depuis qu’ils avaient fui la ville. L’adolescente affolée d’alors s’était transformée en une jeune femme silencieuse dont les yeux disparaissaient presque sous une frange de cheveux aussi noirs que ses pupilles. Une légère contraction des mâchoires renforçait l’expression fermée de son beau visage empreint de gravité. Son corps souple et musclé et son air farouche la faisaient paraître plus sûre d’elle qu’elle ne l’était en réalité. Ses manières, parfois brusques, parvenaient à camoufler une fragilité qu’elle tentait de dissimuler. Même s’il l’aimait comme sa propre fille, Quémal n’avait jamais réussi à se sentir tout à fait à l’aise en sa présence. L’attitude froide et réservée d’Arbèle