Author/Uploaded by Claudine Manrique
Code d’un soir C’était juste un coup d’un soir. Premier jour pour Dap en tant qu’informaticien. Après des années de galère, le jeune homme sent qu’il a enfin trouvé sa voie. Rien ne pourra le faire échouer. Sauf qu’il a couché la veille avec son boss. Linus, son taciturne chef informatique, n’est pas du tout amusé par la situation. Tous deux...
Code d’un soir C’était juste un coup d’un soir. Premier jour pour Dap en tant qu’informaticien. Après des années de galère, le jeune homme sent qu’il a enfin trouvé sa voie. Rien ne pourra le faire échouer. Sauf qu’il a couché la veille avec son boss. Linus, son taciturne chef informatique, n’est pas du tout amusé par la situation. Tous deux décident alors de garder secrète leur aventure et de se comporter en simples collègues. Facile ? Pas quand on commence à échanger des messages jusqu’à une heure du matin ou à se faire du pied sous le bureau. Simples collègues, amants pendant la pause ou plus encore ? Entre la vie en open-space et le management tyrannique, cette embarrassante relation a-t-elle un avenir ? Aux faux artistes Chapitre 1 : System.out.println("Code au bar"); Les basses surpuissantes de la musique à l’étage se glissèrent par l’entrebâillement de la porte. Le chandelier vibra sur ses écrous. La lumière tamisée révéla l’éclat blanc des carreaux, le cadre mordoré des miroirs et les gouttes le long des deux lavabos. Dap s’appuya contre la porte d’entrée en la refermant. Le jeune homme se sentit rassuré. Rien ne bougeait dans les toilettes, hormis son pied qui tapait nerveusement sur le sol. Toutes les conditions étaient réunies, à croire que sa soirée ne pouvait être plus parfaite. Un coin insonorisé et, pour une fois, un Dap de début de soirée qui avait encore les idées claires. Il se hâta le long des trois cabines et poussa la porte de chacune d’une pichenette. La javel collait encore ses relents au fond des cuvettes. C’était drôlement propre pour les toilettes d’un bar bondé. Dap porta un coup d’œil curieux à sa montre. Il avait quand même deux verres dans le sang, sa perception du temps pouvait lui jouer des tours. Vingt et une heures trente-deux. — Y en a qui perdent pas leur temps. Dernière cabine. Dap se rencogna à l’intérieur et en poussa le loquet, les bruits de la fête au-dessus rendus aussi suaves qu’une musique de chambre. À la lumière de l’ampoule dénudée, Dap retourna le contenu de ses poches sur la cuvette. Il y laissa son portable, sa carte de transport et les clés de chez lui. Dap ouvrit son portefeuille et une montagne de tickets de caisse déferla au sol. Il fit un tri rapide avant de tout jeter dans la poubelle accrochée au mur. Il passa en revue ses cartes de payement et de fidélité. Dap écarta la photo d’une femme aux cheveux roux et un billet de dix euros avant d’étouffer un grognement de soulagement. Dans un compartiment secondaire de son portefeuille, il tira un petit sachet carré en plastique. Il le colla dans la paume de sa main, maintenant trempée de sueur. Un coup sec à sa porte. Dap se précipita pour ouvrir. Il tomba nez à nez avec la figure surprise d’un homme de son âge, le poing encore levé. Ses cheveux bouclés en bataille encadraient un visage épais, à la peau brune et craquelée par de vieilles cicatrices d’acné. D’une tête et demie plus petit que Dap, il arborait une simple chemise blanche sur un pantalon de costume, déjà taché par un malencontreux jet de bière. La surprise passée, la figure ronde se renfrogna et les yeux noirs du jeune homme crépitèrent de colère. Son poing levé se desserra, pointant tour à tour la porte et Dap à l’intérieur de la cabine. — Le code, dit-il d’une voix qui résonna aigre et désagréable dans l’habitacle des toilettes. C’était un lent et trois rapides ! Tu ne m’as pas laissé finir. — On avait établi un code ? — Bien sûr. Si jamais quelqu’un d’autre se pointait. — Mais qui frappe avant d’aller aux chiottes ? — C’était pour que personne ne se trompe. Un lent et trois rapides, ce n’est pourtant pas compliqué à retenir. Dap repoussa la porte jusqu’au bout, s’appuyant avec nonchalance sur la poignée. Il agita les doigts pour faire apparaître le sachet plastique dans un geste qui se voulait cool. Mais après deux cocktails au gin, tout ce qu’il réussit fut de le laisser tomber par terre. Dap le ramassa aussitôt et se redressa avec toute l’assurance qu’il lui restait. — On est là pour parler de coups sur une putain de porte ou pour tirer un coup ? Un sourcil broussailleux disparut sous la tignasse de l’autre homme. Pendant une seconde, Dap eut une vision de sa soirée brutalement écourtée, le ventre barbouillé et le moral dans les chaussettes. Affolé par cette perspective, il colla son plus beau sourire sur ses lèvres. Celui qui révélait à peine ses dents et marquait astucieusement ses pommettes, que la vingtaine n’avait pas encore fondues dans les affres de l’âge adulte. Il ne put cependant retenir un rire parce que, quand même, il avait fait une bonne blague. Heureusement pour lui, un trépignement surexcité des danseurs d’électro à l’étage noya son ricanement. Le chandelier se balança d’avant en arrière, marquant les traits encore sceptiques de l’homme devant Dap. L’éclat dans ses yeux noirs s’intensifia. Dap fit un pas en arrière et l’autre se glissa dans la cabine. Il se contorsionna pour refermer la porte, l’effleurant au passage. Parce que Dap le dominait d’une tête, il remarqua la fine pellicule de sueur sur son crâne aux cheveux bouclés. L’homme tourna le loquet et braqua ses yeux noirs charbons sur lui. Il ne laissait paraître aucune nervosité, contrairement à ce que Dap aurait pu croire après son emportement sur le code de la porte. Son sourire charmeur disparu, Dap tendit la main, paume ouverte sur le préservatif. —Tu veux faire ça comment ? Sa voix rauque le trahit et il espéra presque que l’autre lui rie au nez et quitte les toilettes, le laissant seul avec son désir qui grimpait au galop. Son futur partenaire referma les doigts de Dap sur la capote, et ses craintes s’évaporèrent aussitôt. — Vas-y. Dap n’aurait pas