La Cité du savoir

NADIA COSTE LA CITÉ DU SAVOIR L’autrice Nadia Coste est l’autrice de nombreux romans dont Ascenseur pour le Futur chez Syros, ainsi que la série ados à succès Fedeylins (éditions Gründ). Chez Scrineo, elle a notamment écrit Le Premier et Seuls les alligators vous entendront crier. © 2023 Scrineo 73 boulevard de Sébastopol, 75002 Paris Diffusion : Interforum Réalisé avec le concours éditorial d’Agnès MarotDirecteur éditorial : Jean-Paul ArifResponsable éditoriale : Floria GuihéneufÉditrice : Dorine BorghinoMise en page : Clémentine HèdeCorrection : Maxime Gillio ISBN : 978-2-38167-217-5 Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo. Sommaire Titre L’autrice Copyright Chapitre 1 Chapitre 2 Chapitre 3 Chapitre 4 Chapitre 5 Chapitre 6 Chapitre 7 Chapitre 8 Chapitre 9 Chapitre 10 Chapitre 11 Chapitre 12 Chapitre 13 Chapitre 14 Chapitre 15 Chapitre 16 Chapitre 17 Chapitre 18 Chapitre 19 Chapitre 20 Chapitre 21 Chapitre 22 Chapitre 23 Chapitre 24 Chapitre 25 Chapitre 26 Chapitre 27 Chapitre 28 Chapitre 29 Chapitre 30 Chapitre 31 Chapitre 32 Chapitre 33 Chapitre 34 Chapitre 35 Chapitre 36 Chapitre 37 Chapitre 38 Chapitre 39 Chapitre 40 Chapitre 41 Chapitre 42 Chapitre 43 Chapitre 44 Chapitre 45 Chapitre 46 Chapitre 47 Chapitre 48 Chapitre 49 Épilogue Remerciements La conteuse assise devant les enfants n’est pas l’enseignante qui leur dispense habituellement les leçons. C’est une femme d’âge mûr, arrivée par bateau le matin même. Sa toge, d’un violet intense de la couleur des aubergines, est serrée à la taille par une ceinture qui accentue l’effet bouffant des plis au niveau de son ventre. De fins liserés argentés forment des motifs de feuilles subtils sur le tissu et rendent la femme très élégante, mais ce qui impressionne le plus les enfants qui l’écoutent, c’est la cicatrice qui court de son oreille jusqu’au creux de son cou. On l’aperçoit de temps en temps, lorsque sa longue tresse grise se déplace sur son épaule. Les élèves les plus inquiets jettent régulièrement des regards à maîtresse Jolane, assise en retrait, qui a cédé sa place sans discuter et écoute, elle aussi, le récit de la vieille femme. Le cours se déroule en haut de la colline, au pied du phanòs, l’immense tour qui sert à guider les bateaux. Depuis ce village de l’île de Saradoce, on peut apercevoir les silhouettes lointaines d’Hiklion et Pyladosa, les deux autres terres de l’archipel de Trianisia. Avec, au centre de la mer, un immense rocher couvert de bâtiments carrés, très blancs, aux coupoles bleues que le soleil matinal fait briller. Philopolis. La capitale de l’archipel. — L’histoire que je vais vous raconter commence il y a très longtemps, annonce la vieille femme. Bien avant votre naissance. Avant la naissance de vos parents sans doute. Son regard se porte vers l’horizon. Les enfants se tournent aussitôt vers Philopolis. Maîtresse Jolane a souvent promis de leur parler de cet endroit aux nombreuses écoles, bibliothèques, théâtres et autres merveilles, que l’on surnomme « la Cité du Savoir »... — C’est l’histoire de Sophia et de son ami Théo, leur dit la conteuse en posant sa voix. Mais leur aventure n’a pas commencé à Philopolis. Elle pointe l’horizon d’un doigt tremblant. — Il faut d’abord aller dans un minuscule village d’Hiklion. Un village de pêcheurs qui ressemble beaucoup au vôtre. La femme sourit. — Le jour où le bateau est arrivé… Non, dit-elle en secouant la tête. Commençons quelques années avant. Le jour où Sophia a appris à lire. 1 Sophia était fascinée par les gestes de son père. Du haut de ses six ans, elle le regardait encrer les blocs gravés de motifs, déposer une feuille épaisse, abaisser le levier qui entraînait la large plaque de bois afin de marquer le papier. Dès qu’il relâchait la pression sur le levier, Sophia retirait délicatement la feuille imprimée et allait la poser là où attendait un long massicot, qu’elle n’avait pas le droit de toucher. Puis elle reprenait sa place, attentive. À l’autre bout de l’atelier, sa mère cousait des feuillets ensemble tout en surveillant Emrys, deux ans, qui jouait à déchirer des chutes et se les lançait sur la tête en riant, quand il ne les mâchonnait pas. C’est vraiment un bébé, se dit Sophia en roulant des yeux face au comportement de son petit frère. Elle, au moins, était assez grande pour aider ses parents. Et elle avait même le droit d’assister aux leçons dans le phanòs du village, maintenant ! Une fois par mois, un énorme bateau faisait voile depuis Philopolis. Le bateau transportait des marchands, des universitaires en visite, ainsi que des enseignants itinérants chargés de dispenser des cours aux jeunes enfants volontaires. Ces séances, courtes et éloignées dans le temps, donnaient à Sophia l’impression d’effleurer d’immenses connaissances, encore hors de sa portée… * — Une fois par mois ! s’exclame un enfant aux pieds de l’enseignante. Et pourquoi on est obligés de venir tous les jours, nous ? — Chut, Cylan, laisse-la continuer ! le rabroue maîtresse Jolane en s’excusant auprès de leur conteuse du jour. * Emrys vida soudain le casier où étaient rangés les caractères d’imprimerie les plus gros, ceux dont son père se servait pour les titres des livres. — Non ! réagit sa mère. Pas assez vite : les lettres se déversèrent sur le sol, tachant la tunique du petit garçon avant de s’écraser sur ses orteils nus. Emrys se mit à pleurer. Aussitôt, sa mère posa son ouvrage et vint le consoler. — Allez, viens. Ce n’est pas grave. On va aller puiser un peu d’eau pour te nettoyer. Elle échangea un regard avec son mari et, avec un sourire, ajouta : — Tu vois, Ettore, je t’avais bien dit qu’il fallait remonter les casiers d’au moins un étage ! — Tu as toujours raison, répondit-il, plus amusé que contrarié. Il va falloir réorganiser l’atelier. Sophia ? Tu peux commencer à ranger pendant que je termine mes exemplaires ? — Oui, papa ! La fillette se précipita vers les blocs métalliques qui jonchaient le sol. Les caractères avaient été nettoyés, mais