L'intrépide amazone

L’Intrépide Amazone Du même auteur Aux éditions De Borée Les Brûlots de paille, 2009 La Bonne École, 2010 La Vagabonde de Saint-Ours, 2011 Le Domaine des Rochettes, 2013 La Sauvageonne des Maures, 2015 La Rebouteuse, 2016 L’Heureuse Providence, 2019 La Berceuse de sang, 2020 La Panse-Bêtes, 2020 La Vengeance de Jean sans Dieu, 2021, prix du roman historique de Saint-Bonnet-le-Château 2007 Le Filon du hasard, 2021 La Caverne de vie, 2022 Des dentelles de charbon, 2022 Aux éditions du Mot passant Le Retour au mas, 1999, prix des Automnales 2004 La Grimace du givre, 2000, prix Lucien-Gachon 2002 Le Sans-Gueule, 2001 Les Fachines, 2003 Les Sarments d’Hippocrate, 2003 La Cagnotte de Cyprien, 2004 Le Mécréant de Saint-Poutouzat, 2004 Les Jumeaux de Malatresque, 2004, prix Cabri d’Or 2004 L’Inconnu du Vaccarès, 2006 Les Fourches écarlates, 2010 Le Fada des garrigues, 2015 La Noire Tourmente, 2017 La Dévoilée, 2018 Retour de flammes à Montségur, 2020 Les Falaises d’Outretemps, 2020 Les Pierres maudites, 2020 Les Eaux troubles, 2021 En application de la loi du 11 mars 1957, il est interdit de reproduire intégralement ou partiellement le présent ouvrage sans autorisation de l’éditeur ou du Centre français d’exploitation du droit de copie, 20, rue des Grands-Augustins, 75006 Paris. © Michel Lacombe pour la précédente édition, 2000 © Centre France Livres SAS, 2023 45, rue du Clos-Four – 63056 Clermont-Ferrand Cedex 2 Michel Lacombe L’Intrépide Amazone Roman Avant-propos Ma toute première intention était de m’inspirer de la vie de Madeleine de Saint-Nectaire en la transposant en une région différente et en des lieux imaginaires. Je me suis alors aperçu que ses faits d’armes n’avaient jamais fait l’objet d’un roman, ce qui m’a incité à oublier cette première idée et à me tenir au plus près de la réalité. Je ne savais pas alors que je m’attaquais à un vaste défi ! Au fil de mes recherches, je me suis en effet rendu compte que les différents documents auxquels je pouvais avoir accès étaient souvent contradictoires. Ainsi, les généalogies ne coïncidaient pas, les dates divergeaient, les lieux et les événements relatés par plusieurs sources ne correspondaient pas… J’ai failli renoncer et me contenter d’une fiction libre de toute contrainte historique, mais j’ai préféré m’entêter malgré tous ces obstacles. Pour cela, j’ai été obligé de choisir parmi toutes ces imprécisions afin de dépeindre ce personnage d’une façon romanesque, mais sans trop dénaturer sa possible réalité. Ainsi, certains textes insistent sur sa vertu après son veuvage, alors que la légende prétend que son fantôme hante encore les lieux en repentance de ses innombrables amants ! La plupart des textes la disent veuve encore jeune en 1566, alors qu’un autre cite le testament de son mari des décennies plus tard. J’aurais pu imaginer pour ce couple une séparation volontaire après que mon héroïne se fut convertie au protestantisme, mais j’ai préféré me rallier à la majorité des témoignages d’époque. C’est pourquoi, sans preuve aucune, je le fais mourir de la peste… Certains ouvrages mélangent aussi noms et lignées, au point de confondre, par exemple, Gilles de Montal et François de Nozières… etc. À chaque page ou presque, j’ai été confronté à ce genre de problèmes qui demandaient souvent plus de vérifications finalement vaines que de moments d’écriture. Tout cela pour dire au lecteur que, si j’ai parfois été obligé de tordre un peu l’Histoire, je me suis efforcé de ne pas vraiment l’essorer ! Bonne lecture à tous. 1 Une aurore grise persistait, luttant désespérément contre les assauts d’un pâle soleil naissant. Dans la cheminée crépitaient encore quelques brandons rougeoyants mais, malgré le printemps, la température de la petite pièce restait fraîche, en ces régions de moyenne montagne. Le pays d’Auvergne savait se montrer rude en toute saison, tout autant que ses habitants ! Magdeleine, seule fille de l’illustre famille propriétaire des lieux, bénéficiait contrairement à ses trois frères aînés d’une chambre pour elle seule dans une partie de l’aile du château. Un nid qui restait douillet, même l’hiver, pour une enfant de son âge. Encore la fillette qu’elle était pouvait se targuer de dormir dans un lit-clos, l’un des tout premiers conçus dans la contrée et inspiré de la mode bretonne… Le grincement de la porte la tira des vapeurs du sommeil, et elle ne sursauta même pas lorsque Franchou lui intima de sa voix familière en ouvrant les portes du lit : — Allons, debout, damoiselle… Il est temps de se lever ! Elle bâilla longuement : pourquoi lui était-il impossible de sortir de ses draps à l’heure qui lui convenait ? Mais comment en vouloir à Franchou qui, dès treize ou quatorze ans, avait été sa fille de compagnie et l’avait accompagnée tout au long de son encore courte vie. La petite lui vouait une affection sans faille, et bien plus qu’à sa propre mère qu’elle ne voyait que rarement… et pas tous les jours ! — Allez, la belle… Pas question de rester au lit ! D’abord, la prière, et ensuite debout. C’est dimanche, aujourd’hui. Dimanche ! Magdeleine grimaça : elle détestait ce jour où la messe était de rigueur pour tous. Elle s’y ennuyait tellement, au fil d’un rituel immuable, à entendre le curé parler dans un langage incompréhensible ! Une véritable corvée… Après une brève toilette, Franchou entreprit de lui brosser ses longs cheveux, une torture qu’elle n’appréciait guère. — Mais arrête donc de bouger comme ça ! Tu seras la plus belle de toute l’assemblée… Elle ne répondit que par une moue : qu’en avait-elle à faire, d’être la plus belle ? Elle préférait largement échapper aux murs du château pour jouer avec les garnements du village. Chose interdite, bien sûr, mais d’autant plus excitante ! — Descendons aux cuisines, maintenant. Il faut que tu manges un morceau… Ensuite, je t’aiderai à t’habiller comme il se doit ! — Pff… Je préfère mes habits de semaine ! — La semaine, c’est une chose, demoiselle Magdeleine. Et le dimanche en est une autre ! — Alors j’aimerais que les semaines soient sans dimanche