Onyeka et l'Académie du soleil

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ISBN : 978-2-01-719033-2 Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo. À Goziam… je te choisis, pour toujours. — Onyeka ! Je tressaille. Un picotement me parcourt le crâne quand la voix de Cheyenne, impatiente, transperce l’onde de panique qui monte en moi. — Allez, quoi ! Tu comptes rester cachée là jusqu’à l’an prochain ? Rendez-vous en 2026 ? La chaleur déjà étouffante des vestiaires empire encore et l’odeur de chlore m’agresse les narines. J’ai envie de vomir. — Je vais rester là, je marmonne à l’épais battant de bois qui nous sépare. Des pieds piaffent devant la porte puis un coup sec retentit. — La piscine va fermer, à ce rythme-là, me renvoie Cheyenne sans la moindre empathie. Tu l’as mis, oui ou non ? Je bloque sur le bonnet de bain que ma mère a tenu à ce que je porte ; il est par terre, je l’ai jeté. Je savais qu’il allait m’attirer des ennuis. — C’est pas ma taille, je déclare. J’ai essayé. Mes cheveux sont trop longs. Cheyenne émet un mélange de soupir et de grognement… un soupignement. — Eh ben, ne le mets pas, alors. Un petit ricanement m’échappe. — Tu sais comment ma mère va réagir si je détache mes cheveux ou si je les mouille. — Elle n’en saura rien, m’assure Cheyenne. Mais son mensonge ne nous trompe ni elle ni moi. Ma mère finit toujours par tout savoir. C’est son super-pouvoir. — Je vais rester là, je répète. Sauf que cette fois, un flottement dans ma voix me trahit. Cheyenne est trop forte pour moi. Et comme elle le sait aussi bien que moi, elle passe aussitôt à l’attaque, comme un guépard dans les documentaires dont ma mère raffole. On les regarde ensemble les rares fois où elle ne travaille pas. — Ouvre, tonne Cheyenne. Le silence s’abat instantanément dans les vestiaires. Mon ventre se crispe. Ça m’horripile, quand elle fait ça. Qu’elle aime attirer l’attention, c’est une chose, mais rien ne m’oblige à aimer ça. La cabine déjà minuscule se referme sur moi, ma poitrine se contracte, j’ai du mal à respirer. L’énergie fuse à travers ma peau mais je la contiens. Je dois me maîtriser. J’ai l’interdiction absolue de perdre mes moyens. C’est la première des règles que m’impose ma mère. Je n’ai pas oublié la première fois où j’ai connu cette sensation. On attendait à l’arrêt de bus, elle et moi, quand des enfants ont commencé à se moquer de mes cheveux. Ma mère les a ignorés puis elle s’est penchée vers moi, comme si elle savait que j’allais craquer. Un doux sourire aux lèvres, elle m’a expliqué que je devais contrôler mes émotions, autrement il arriverait malheur. Ça, c’était avant qu’elle m’apprenne à utiliser la suite de Fibonacci pour maîtriser mes émotions. Ce calcul remonte à l’Antiquité indienne, il me semble, mais on lui a donné le nom d’un savant italien – allez comprendre. Par contre, ça marche. Difficile de perdre son calme quand on cherche à se rappeler l’ordre des nombres. Bref, je ferme les yeux et me mets à compter, j’égrène la suite pour tenter de me calmer. Zéro… Un…