De l'argent à flamber

Ouvrage publié avec le concoursde la Fondation danoise pour les arts PENGE PÅ LOMMEN (SCANDINAVIAN STAR #1)Copyright © Asta Olivia Nordenhof, 2020Publié en accord avec la Copenhagen Literary Agency ApS, Copenhagen. © Les Argonautes Éditeur, 2023, pour la traduction française ISBN : 978-2-494289-13-0 Graphisme : Lauriane TiberghienCouverture : © Getty imagesPortrait de l’autrice : © Albert Madsen Pour en savoir davantage sur Les Argonautes Éditeuret suivre l’actualité de la littérature européenne,abonnez-vous à la newsletter sur notre site.www.argonautes-editeur.fr Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo. TABLE DES MATIÈRES TitreCopyrightUn visage en rêveChapitre 1KurtChapitre 2Chapitre 3Chapitre 4Chapitre 5Chapitre 6Chapitre 7Chapitre 8Maggie se réveilleChapitre 9Chapitre 10Chapitre 11Chapitre 12Chapitre 13La jeunesse de MaggieChapitre 14Chapitre 15Chapitre 16Chapitre 17Chapitre 18Chapitre 19Chapitre 20Scandinavian StarChapitre 21Chapitre 22Chapitre 23Chapitre 24Chapitre 25Chapitre 26Chapitre 27Une énorme bête d'un blanc étincelantChapitre 28Chapitre 29Chapitre 30Chapitre 31Quelques paroles duresChapitre 32Chapitre 33Chapitre 34Chapitre 35Chapitre 36Au Café BlomstenChapitre 37Chapitre 38Chapitre 39Chapitre 40Chapitre 41Chapitre 42Chapitre 43Passage en revue de la vie de KurtChapitre 44Chapitre 45Chapitre 46Chapitre 47Chapitre 48Chapitre 49Chapitre 50Un coup de fil de CopenhagueChapitre 51Remerciements UN VISAGE EN RÊVE J’étais dans un bus quelque part sur l’île de Fionie. Le bus s’est rangé sur le côté, et par la vitre un homme aux cheveux blancs m’a regardée. Je ne saurais dire pourquoi – il ressemblait à d’autres hommes –, mais quand le bus a redémarré j’ai eu la sensation désagréable d’emporter quelque chose de lui. Par la suite, il m’est devenu de plus en plus difficile de ne pas penser à lui. Je ne pouvais pas m’en empêcher, il fallait que je retrouve son visage. Il semblait surgir d’un rêve, se dressant devant moi sans que je puisse en saisir le moindre détail. Ce visage m’évoquait une ferme. Une ferme en bois, dont le mur d’enceinte m’apparaissait lisse et silencieux la nuit. J’aurais aimé oublier cet homme, mais sa présence continuait à trembler étrangement dans mon dos. J’étais suivie, mais c’était plus que ça : mon poursuivant s’était infiltré en moi comme pour mieux se regarder lui-même. Cela a duré quelques semaines, puis je me suis rendue à l’évidence : je devais retourner à l’endroit où je l’avais vu. De la gare de Nyborg, j’ai descendu l’avenue déserte menant à la ville. J’ai acheté une bière dans une pizzeria et pour la boire je me suis assise face au château. Elle était tiède. Il n’y avait pas grand-monde dehors. Des petits groupes de gens qui marchaient ou s’asseyaient avec des glaces. L’eau basse dans les douves était immobile, la moindre libellule qui se posait à la surface suffisait à la faire frémir. Une couvée de canetons se blottissait sur une pierre chauffée par le soleil. Je me suis secouée pour repartir et chercher le bus que j’avais pris la fois KURT La matinée est bien avancée. Kurt est seul dans son bureau. Il fait chaud. Au mur pend le calendrier d’une marque de dessous chic. Maggie l’a eu dans un magasin et ne savait pas quoi en faire sinon le donner à Kurt, qui de son côté ne savait pas quoi en faire sinon l’accrocher au mur. Il n’en comprend pas les images, il les trouve froides, et penser à ce que Maggie imagine qu’il pense d’elles le perturbe. Croyait-elle sincèrement lui faire plaisir ou s’agissait-il plutôt de lui témoigner sa générosité ? Aurait-il dû refuser ce cadeau ? Le prendre comme un signe de mépris et s’en offusquer ? Ou alors y voir une question et, si oui, laquelle ? Il a oublié de changer de mois, a laissé traîner janvier jusqu’en mai et feuillette à présent pour trouver la femme de la saison avec une précipitation distraite, prêt à se retourner et à répondre qu’il ne sait pas ce qu’il fait et que dans cette affaire il est tout à fait innocent. Puis il décroche le téléphone et pour la quatrième fois il explique à un certain Henrik Mikkelsen qu’il peut lui réserver les sièges de devant mais qu’on ne paie qu’en montant à bord. Le téléphone, Kurt, ça a le don de le rendre nerveux. Quand il sonne, c’est comme si un fil métallique remontait le long de sa colonne vertébrale, et quand il ne sonne pas, Kurt attend. Il parle très fort dans le combiné, se lève et arpente le minuscule demi-cercle que lui autorise la longueur du fil, entraînant l’appareil, qu’il rattrape à tâtons au bord du bureau pour le remettre à sa place. Il a