Cœur de sorcière

Ceci est une œuvre de fiction. Toute ressemblance avec des personnages, lieux, organisations ou évènements existant ou ayant existé ne serait que purement fortuite. AVERTISSEMENT DE CONTENU ACCOUCHEMENT, DESCRIPTION SANGLANTE, FAUSSE COUCHE, FEU, GROSSESSE, GUERRE, MEURTRE, MORT, MORT D’UN ENFANT, MORT D’UN ANIMAL, NAISSANCE D’UN ENFANT, PERSONNE BRÛLÉE VIVE, PROCÉDURE MÉDICALE (EN PARTICULIER LES SUTURES), RELATION TOXIQUE, SANG, SÉPARATION FAMILIALE, TORTURE Cœur de Sorcière par Genevieve Gornichec Witch’s Heart © Genevieve Gornichec 2021 All rights reserved including the right of reproduction in whole or in part in any form. This edition published by arrangement with Ace, an imprint of Penguin Publishing Group, a division of Penguin Random House LLC. Illustration de jaquette (édition reliée) et couverture (édition brochée) : Adam Auerbach Illustration de couverture (édition reliée) : personnage féminin © MargoKarma/Shutterstock.com ; cadre © Elivagar/Shutterstock.com Conception graphique des couvertures, jaquette, tranches et pages de garde françaises : Volodymyr Feschuk – Eilean Books Ouvrage publié sous la direction de Cyril Granoulhac © Éditions Sabran, 2023 pour la présente édition. Tous droits de traduction, de reproduction et d’adaptation réservés pour tous pays. Toute reproduction, même partielle, de cet ouvrage est interdite sans l’autorisation écrite de l’éditeur. Une copie ou une reproduction par quelque procédé que ce soit constitue une contrefaçon passible des peines prévues par la loi sur la protection du droit d’auteur. _____________________ © Éditions Sabran, 2023 EAN : 978-237876-183-7 ISBN : 978-237876-181-3 (broché) ISBN : 978-237876-182-0 (relié) ISBN : 978-237876-183-7 (e-book) Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo . Pour Poppy Sommaire TitreCopyrightDédicacePremière partieDeuxième partieTroisième partieRemerciementsAppendice Première Partie I l y a fort longtemps, lorsque les dieux étaient jeunes et Asgard encore récent, une sorcière apparut du bord des mondes. Elle connaissait nombre d’anciens sorts, mais était particulièrement douée pour le seid , une forme de magie permettant de voyager hors de son corps pour prédire l’avenir. Cela plaisait énormément à Odin, le plus grand des Ases ; lorsqu’il eut vent d es capacités de la sorcière , il proposa de l ui communiquer sa connaissance des runes, pour peu qu’elle consentît à lui enseigner le seid . Elle douta tout d’abord. Elle avait suffisamment entendu parler d’Odin pour hésiter. Elle savait toutefois qu’il ne partageait pas aisément ses secrets, ce qui signifiait qu’apprendre le seid comptait effectivement beaucoup pour lui. Elle ravala donc les soupçons qu’elle pouvait nourrir au sujet de ce dieu borgne et sinistre, et accepta son offre. Alors qu’ils s’exerçaient ensemble au seid , la sorcière se retrouva attirée plus loin qu’elle n’avait jamais voyagé et finit par se heurter à un lieu plus sombre que le début du temps. Cet endroit l’effrayait et recelait des secrets immenses et terrifiants, elle n’osa donc s’aventurer plus avant – au grand déplaisir d’Odin, qui convoitait le savoir dissimulé dans ces profondeurs et s’était convaincu qu’elle seule pourrait l’atteindre. La sorcière enseignait aussi sa magie aux rivaux des Ases, les Vanes, une autre race de dieux dont elle avait traversé le domaine en se rendant à Asgard. Les Vanes ne pensèrent qu’à l’or pour récompenser la sorcière, mais cela l’intéressait assez peu. Toutefois, quand Odin s’avisa qu’elle voyageait entre Asgard et Vanaheim, il perçut là une occasion à saisir. Il monta les Ases contre la sorcière, qu’il nomma Gullveig, « soif d’or ». Ils la pourfendirent de leurs épieux et la brûlèrent à trois reprises, mais elle renaquit les trois fois – car elle était très vieille et très difficile à tuer, bien plus qu’elle n’en avait l’air. Chaque fois qu’elle brûla, Odin tenta de la forcer à plonger dans le lieu sombre pour apprendre ce qu’il désirait savoir, mais chaque fois elle résista. Et lorsque les Vanes apprirent le traitement que les Ases lui réservaient, ils se mirent en rage, et la première guerre du cosmos fut ainsi déclarée. À sa troisième renaissance, Gullveig s’enfuit, laissant cependant quelque chose derrière elle : son cœur transpercé, fumant encore sur le bûcher. Ce fut là qu’ il le trouva. Plus tard, il remonta sa trace dans les bois les plus sombres et profonds, sur la frontière la plus éloignée de Jötunheim, la terre des géants, cruels ennemis des Ases. Les troncs gris et noueux de cette Forêt-de-Fer étaient si épais qu’aucun sentier n’y sinuait réellement, et si hauts qu’ils empêchaient totalement la lumière du soleil de passer. Il n’eut cependant pas à s’aventurer dans ces lieux, car il trouva la sorcière au bord de la rivière séparant la Forêt-de-Fer du reste de Jötunheim ; assise sur une couverture de laine rugueuse, un manteau épais drapé autour des épaules, une capuche rabattue sur la tête, elle scrutait la dense futaie et les montagnes qui s’élevaient derrière le cours d’eau. Le soleil brillait, mais elle restait dans l’ombre, les mains croisées dans son giron, adossée à un arbre. Il la contempla un moment en se balançant d’un pied sur l’autre, en se grattant le nez, en écoutant le murmure bucolique de l’eau et le sifflement des oiseaux. Puis, il s’approcha d’un pas nonchalant, les mains jointes derrière lui. Il ne distinguait que la moitié inférieure de sa figure, mais sa peau semblait rose – délicate, guérie, nouvelle . Quand il fut plus près, il constata que celle de ses mains était dans le même état. La sorcière donnait l’impression de se reposer paisiblement. Une partie de lui rechignait à la déranger. D’un autre côté, il avait toujours trouvé le concept de paix particulièrement ennuyeux. « Combien de temps comptes-tu rester planté ici ? » l’interrogea-t-elle d’une voix si râpeuse qu’on eût dit qu’elle n’avait rien bu depuis une éternité. Il supposait qu’inhaler la fumée de son propre bûcher funéraire en trois occasions devait produire ce genre d’effet. « Tu es une femme difficile à pister », répondit-il. En vérité, il ne savait trop comment procéder. Il était venu lui rapporter ce qu’elle avait laissé dans la demeure d’Odin – mais aussi dans un autre but, même s’il peinait à déterminer celui-ci. Quelque chose l’avait poussé à se rendre ce jour-là