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Hollywood s'en va en guerre

Author/Uploaded by Olivier Barde-Cabuçon


 
 OLIVIER BARDE-CABUÇON
 
 HOLLYWOOD S’EN VA EN GUERRE
 
 
 
 
 
 
 
 GALLIMARD
 
 
 
 
 
 À Christine, Thibault et Jean-Michel, 
 
 
 
 À Hollywood, la fabrique du rêve, et à celles et ceux qui ont laissé leur empreinte sur le chemin du noir et blanc, 
 
 
 
 À Raymond Chandler, Dashiell Ham...

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 OLIVIER BARDE-CABUÇON
 
 HOLLYWOOD S’EN VA EN GUERRE
 
 
 
 
 
 
 
 GALLIMARD
 
 
 
 
 
 À Christine, Thibault et Jean-Michel, 
 
 
 
 À Hollywood, la fabrique du rêve, et à celles et ceux qui ont laissé leur empreinte sur le chemin du noir et blanc, 
 
 
 
 À Raymond Chandler, Dashiell Hammett, Humphrey Bogart et Lauren Bacall, qui nous ont ouvert à coups de plume et de pistolet la voie des ténèbres.
 
 
 
 Je suis dure à avoir, Steve. Tout ce que vous avez à faire, c’est demander. lauren bacall à humphrey bogart dans Le port de l’angoisse Je n’aurais jamais dû passer du scotch au martini. humphrey bogart prologue Washington – 2 juin 1941 Il ne faut pas se fier aux apparences, se dit Lindqvist. Le type en face de moi a une tête de républicain convaincu et pourtant c’est un démocrate influent qui a l’oreille du président Franklin Delano Roosevelt ! À l’autre bout de la table, un autre homme, un vieux dur à cuire au visage tanné par le soleil, ne pipait mot et le fixait comme un loup affamé en fin de période de jeûne. Son collègue l’avait présenté comme M. Anderson mais, même à cette occasion, il n’avait pas ouvert la bouche. — Depuis longtemps, disait le conseiller de Roosevelt, notre pays vit replié sur ses frontières. L’Europe n’existe plus, la France est un souvenir éternel. Combien de temps l’Angleterre va-t-elle encore résister ? Malgré la pression du président, le Congrès refuse de voter l’entrée en guerre auprès de nos alliés anglais. Nous allons devoir compter sur une maladresse du Japon ou de l’Allemagne. Un incident dont on devra tirer parti. Lindqvist haussa un sourcil. En 1915, le torpillage par un sous-marin allemand du paquebot britannique Lusitania, faisant 1 200 victimes civiles dont 128 citoyens américains, avait retourné l’opinion publique américaine jusque-là isolationniste. — Nous devrons alors sauter sur l’occasion pour déclarer la guerre ou faire monter d’un cran notre niveau d’engagement, continua l’orateur. Mais pour cela, il faut que l’opinion soit préparée. Beaucoup de gens ne veulent pas de cette guerre. Pourquoi envoyer nos gars se faire tuer au-delà de l’océan pour de vieux Européens arrogants ? C’est là que votre studio de Hollywood intervient. Lindqvist dissimula sa surprise. La Warner Bros semblait plus désignée. Jack Warner trépignait, impatient d’entrer en guerre contre les nazis. C’était un proche de Roosevelt et, dès 1939, il avait produit Les aveux d’un espion nazi, avec Edward G. Robinson dans le rôle phare. Trop évident et partial du fait de sa judéité. Un White Anglo-Saxon Protestant comme Lindqvist, voilà ce que l’on recherchait ! — Hollywood peut devenir une machine à propagande, reprit l’homme du gouvernement. Quatre-vingt-cinq millions de spectateurs par semaine. Vous voyez un peu la force de frappe ? — Hollywood, ce n’est pas moi. Les Big Five, cinq grandes compagnies, dominaient le marché : Metro Goldwyn Mayer, Paramount, la Fox, RKO et Warner Bros. Sans oublier les Little Three : Columbia, Universal et United Artists, tout aussi importantes mais qui ne possédaient pas de salles de cinéma. À côté, le studio Lindqvist était un Lilliputien. — Ce sont les indépendants qui ont mené l’attaque contre le régime nazi, rétorqua le politique. Hitler, le règne de la terreur en 1934, J’étais une captive des nazis en 36, Le dictateur de Chaplin l’an dernier. Soixante-dix pour cent des producteurs sont juifs ou d’origine juive, mais ils ont un tel désir d’être reconnus simplement comme des Américains qu’ils hésitent à s’engager totalement contre Hitler. — Vous oubliez la Warner, rétorqua Lindqvist. Les dirigeants des majors étaient des antinazis convaincus. L’arrivée au pouvoir de Hitler les avait secoués, mais les patrons des studios avaient préféré dans un premier temps mettre de l’eau dans leur vin. Le marché européen était en jeu. Désormais, il n’existait plus. — Il nous faut un film dramatique où l’on nomme un chat, un chat. Adolf Hitler, ce n’est pas Adenoïd Hynkel, le dictateur de la Tomanie de Chaplin, c’est le maître du IIIe Reich. Et je ne vous parle pas d’un divertissement comme chez Warner, mais d’un film engagé qui met en scène l’exécution de Juifs par les nazis et révèle l’existence de leurs alliés aux États-Unis, les isolationnistes d’America First. Lindqvist comprit alors pourquoi c’était lui qui était là, et non les grandes compagnies. Les studios Lindqvist, une petite firme sans salles, avec un catalogue encore restreint mais que les choix de ces dernières années avaient mise en avant. — La moitié des gens dans ce pays partagent l’opinion d’America First de ne pas intervenir dans la guerre, protesta-t-il. Vous voulez m’envoyer à l’abattoir ! Louis B. Mayer et les autres vous riraient au nez. Il lui rappela Hitler, beast of Berlin, d’un petit producteur indépendant, sorti en 1939, censuré et interdit de projection dans l’État de New York. Le film racontait l’histoire de résistants au régime nazi à Berlin qui finissaient dans un camp. — Et après La tempête qui tue, l’an dernier, le sénateur Clarke a déclaré que ces films antinazis polluaient l’esprit des spectateurs, manipulaient leurs émotions et les poussaient à la guerre. Les patrons des grands studios ont dû venir se justifier devant une commission sénatoriale ! L’homme du gouvernement se pencha vers lui. — Qui êtes-vous, monsieur Lindqvist ? — Pardon ? — Qu’est-ce qui vous caractérise le mieux ? Un producteur ambitieux qui n’a pas peur de se frotter aux majors, un Américain de la seconde génération, ou bien le petit-fils d’un cordonnier suédois ? Apparemment, l’autre avait bien préparé sa réunion. Cela ne suffit toutefois pas à impressionner le producteur. — À part les Indiens que vous avez parqués dans des réserves, tous les Américains sont originaires d’ailleurs. Mais il est exact que ma famille ne possède pas l’ancienneté de vos esclavagistes du Sud, ni de leurs esclaves noirs. Le démocrate resta un moment estomaqué, puis fut gagné d’un rire silencieux. —

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