Author/Uploaded by Elizabeth Lim
Copyright texte original © Elizabeth Lim, 2021Traduction française © Rageot-Éditeur, 2023 Graphisme de couverture : Lydia Blagden © Hodder & Stoughton Illustration de couverture : Kelly Chong Carte : Virginia Allyn L’édition originale de cet ouvrage a paru en 2021 en langue anglaise chez Alfred A. Knopf, une marque de Random House Children’s Books, une division de Penguin Random House LLC, N...
Copyright texte original © Elizabeth Lim, 2021Traduction française © Rageot-Éditeur, 2023 Graphisme de couverture : Lydia Blagden © Hodder & Stoughton Illustration de couverture : Kelly Chong Carte : Virginia Allyn L’édition originale de cet ouvrage a paru en 2021 en langue anglaise chez Alfred A. Knopf, une marque de Random House Children’s Books, une division de Penguin Random House LLC, New York sous le titre SIX CRIMSON CRANES. La présente édition est publiée avec l’aimable autorisation de l’autrice. ISBN : 9782700280258 © RAGEOT-ÉDITEUR – PARIS, 2023 Loi no 49-956 du 16-07-1949 sur les publications destinées à la jeunesse. Sommaire Couverture Page de titre Page de copyright Sommaire Carte Dédicace CHAPITRE 1 CHAPITRE 2 CHAPITRE 3 CHAPITRE 4 CHAPITRE 5 CHAPITRE 6 CHAPITRE 7 CHAPITRE 8 CHAPITRE 9 CHAPITRE 10 CHAPITRE 11 CHAPITRE 12 CHAPITRE 13 CHAPITRE 14 CHAPITRE 15 CHAPITRE 16 CHAPITRE 17 CHAPITRE 18 CHAPITRE 19 CHAPITRE 20 CHAPITRE 21 CHAPITRE 22 CHAPITRE 23 CHAPITRE 24 CHAPITRE 25 CHAPITRE 26 CHAPITRE 27 CHAPITRE 28 CHAPITRE 29 CHAPITRE 30 CHAPITRE 31 CHAPITRE 32 CHAPITRE 33 CHAPITRE 34 CHAPITRE 35 CHAPITRE 36 CHAPITRE 37 CHAPITRE 38 CHAPITRE 39 CHAPITRE 40 REMERCIEMENTS À Charlotte et Olivia, ma plus belle aventure. Vous êtes ma joie, mes prodiges et mes amours. CHAPITRE 1 Le fond du lac avait un goût de terre, de sel et de regret. L’eau était si trouble que garder les yeux ouverts relevait du supplice, mais grâce aux dieux, j’y parvins. Sans quoi, j’aurais manqué le dragon. Plus petit que ce que j’imaginais, il avait la taille d’une barque, des yeux brillants couleur rubis et des écailles vert jade. Rien à voir avec les monstres qui, selon la légende, étaient grands comme un village et pouvaient engloutir tout un vaisseau de guerre. Il s’approcha jusqu’à ce que ses yeux ronds reflètent les miens. Il me regardait me noyer. « À l’aide », le suppliai-je en suffoquant, une seconde à peine avant de sombrer. Le dragon me fixa, haussant un sourcil duveteux. J’espérai un instant qu’il me porte secours, mais sa queue s’enroula autour de mon cou, m’arrachant mon dernier souffle. Ensuite, tout devint noir. Avec le recul, je regrettai d’avoir dit à mes gouvernantes que j’allais sauter dans le lac Sacré. Mais ce matin-là, la chaleur était si insoutenable que, dehors, les chrysanthèmes avaient flétri et les rapaces qui voletaient au-dessus des citronniers étaient trop assoiffés pour chanter. Sans compter qu’un plongeon dans le lac semblait une alternative idéale à la célébration de mes fiançailles – ou, comme je me plaisais à les appeler, la fin sinistre de mon avenir. Malheureusement, mes gouvernantes me crurent et la nouvelle parvint aux oreilles de Père plus rapidement qu’un démon de feu. Quelques minutes plus tard, il envoyait l’un de mes frères et une escouade de gardes à l’air austère me chercher. C’est ainsi qu’en ce jour le plus chaud de l’année, on m’emmenait dans les couloirs souterrains du palais vers la fin sinistre de mon avenir. Tout en suivant mon frère, j’agitai ma manche, feignant de réprimer un bâillement pour y jeter un coup d’œil. – Arrête, me réprimanda Hasho. J’abaissai mon bras et bâillai de plus belle. – Si je bâille maintenant, je n’aurai pas à le faire devant Père. – Shiori… – Tu ne sais pas ce que c’est que de se lever à l’aube pour qu’on te brosse les cheveux mille fois. Ni de marcher empêtrée dans une tonne de soie, rétorquai-je. (Je levai les bras, mais peinai à les garder en l’air tant mes manches étaient lourdes.) Regarde-moi toutes ces couches de tissu, il y aurait de quoi gréer un navire pour traverser l’océan. Hasho esquissa l’ombre d’un sourire. – Les dieux t’entendent, chère sœur. Pour chaque plainte que tu émets, ton fiancé aura une cicatrice de plus au visage. Mon fiancé. Son évocation me laissait indifférente et incitait mon esprit à s’échapper vers des pensées plus plaisantes telles qu’amadouer le chef cuisinier du palais pour qu’il me prépare sa fameuse pâte de haricots rouges – ou, mieux encore, traverser la mer de Taijin en bateau. Fille unique de l’Empereur, je n’avais jamais pu voyager, ni même m’aventurer au-delà de Gindara, la capitale. Or dans un an, je serai trop âgée – et trop mariée – pour une telle escapade. Tout cela était si humiliant que je soupirai bruyamment. – Alors je suis maudite. Il sera hideux. Mon frère rit et me poussa en avant. – Allez, cesse de râler. Nous y sommes presque. Je levai les yeux au ciel. Hasho commençait à parler comme s’il avait soixante-dix ans et non dix-sept. De mes six frères, c’était lui mon préféré, car nous avions la même vivacité d’esprit. Mais depuis qu’il s’était mis à prendre son rôle de prince au sérieux, il la gaspillait en jouant aux échecs au lieu de préparer des mauvais coups et il y avait des choses je ne pouvais plus lui confier. Comme, par exemple, ce que je cachais dans ma manche. Un chatouillis remonta le long de mon bras. Je me grattai le coude et, par précaution, refermai ma large manche. Si Hasho avait su ce que je dissimulais dans ses plis, j’en aurais entendu parler jusqu’à la fin de mes jours. Par lui, ou par Père. – Shiori, murmura Hasho, tu as des ennuis avec ta robe ? – J’ai cru qu’elle était tachée, dis-je en frottant une salissure imaginaire sur ma manche. Il fait si chaud, aujourd’hui. (Je fixai ostensiblement la montagne et le lac.) Tu ne préférerais pas qu’on soit en train de se baigner plutôt que sur le point d’assister à cette cérémonie ennuyeuse ? Hasho me regarda d’un air méfiant. – Shiori, ne détourne pas la conversation. Je baissai la tête, m’efforçant d’afficher une mine contrite et ajustant discrètement ma manche. – Tu as raison, Frère, il est temps que je grandisse. Merci de… de… Quelque chose effleura à nouveau mon bras et je rabattis mon coude afin d’étouffer le bruit. Mon secret commençait à s’agiter et